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# 84 ≡ Re: PRIX DE L'ARC DE TRIOMPHE 2016 (gr I, Chantilly) 02.10 |
Groupe I
5900 posts depuis le 4/7/2010
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Aidan O’Brien : l’orfèvre-horloger au travail
Mercredi 21 septembre 2016. Nous avons rendez-vous à Ballydoyle pour assister à un lot avec Aidan O’Brien. La rencontre doit débuter à 10 h 45. Pas question d’arriver en retard : avec l’entraîneur irlandais, tout est minutieusement calculé – chaque minute et chaque détail ont leur importance. Ballydoyle se situe entre l’horlogerie et l’orfèvrerie !
Ballydoyle, un endroit unique au monde.
Nous partons de Coolmore et, en une vingtaine de minutes, nous sommes aux portes de Ballydoyle. Le centre est à notre gauche. Sur notre droite, il y a une piste : la P.S.F. créée par Vincent O’Brien, le précédent maître et fondateur des lieux. Nous marquons un arrêt devant la maison du gardien, le temps de récupérer nos badges visiteurs. Puis nous repartons. À notre gauche, une cour dédiée aux pouliches, où se trouvent Found, Minding ou encore Alice Springs. Nous arrivons au niveau des bureaux de Ballydoyle, où se trouvent les statues de Yeats et de Giant’s Causeway. Il est 10 h 45. Aidan O’Brien arrive dans la minute au volant de son 4x4. Toujours aussi bien élevé, comme lorsqu’on le croise aux courses, l’entraîneur descend de la voiture et vient serrer la main de chacun d’entre nous, accompagnant son geste d’un mot d’accueil. Les présentations faites, il nous invite à monter en voiture, nous précisant que nous allons assister à un lot de 2ans. « Tout le monde parle anglais ? » demande-t-il. La réponse est positive. « C’est bien », répond l’entraîneur. Aidan O’Brien démarre et va, à assez vive allure, là où nous attendent les 2ans. Sur le trajet, nous passons le long d’une piste avec un tournant serré, qui rappelle étrangement l’hippodrome d’Epsom : « Oui, c’est bien Tattenham Corner. Cela nous permet de préparer le Derby », précise l’entraîneur. Ballydoyle est immense, avec pistes en gazon et P.S.F. On y trouve aussi une très longue ligne droite, vallonnée, qui reproduit le profil de la ligne droite d’Ascot. Aidan O’Brien explique : « Nous avons entre vingt et vingt-cinq possibilités de configuration de piste. » À la question de savoir s’il a fait beaucoup d’aménagements sur Ballydoyle depuis son arrivée, par rapport à l’époque de Vincent O’Brien, Aidan O’Brien répond : « Non, juste deux ou trois petites choses… » lll
Un contact permanent avec tous les cavaliers
Aidan O’Brien a constamment sur lui deux talkieswalkies. Tous les cavaliers sont munis d’oreillettes, de sorte qu’Aidan O’Brien est en contact permanent avec eux pour leur donner des instructions ou des précisions. Il sait précisément quel cavalier monte quel cheval. Un autre talkie lui permet d’être en correspondance avec les responsables des cours. Aidan O’Brien nous a précisé : « Actuellement, nous avons entre quarante-cinq et cinquante cavaliers à Ballydoyle. Ce nombre peut monter jusqu’à soixante ou soixante-dix quand tout le monde est là. »
Arrivée sur les chapeaux de roues.
Nous arrivons ensuite dans la partie du centre où logent les 2ans. Aidan O’Brien salue tout le monde. Et si les personnes qu’il n’a pas encore croisées se trouvent trop loin pour entendre son bonjour, il ne se contente pas d’un signe de main à la va-vite. Non, Aidan O’Brien leur fait un signe franc, toujours en les regardant, et tout le monde le salue en retour : « Environ 180 personnes travaillent à Ballydoyle. » Un de ses cadres est proche ; l’entraîneur s’arrête, discute avec lui, demande quelques précisions, s’apprête à repartir, se ravise, et suggère pour conclure leur échange : « Il commence à faire froid le matin, peut-être faudra-t-il utiliser les grosses couvertures. » Le cadre acquiesce. Les 2 ans, eux, tournent calmement dans un grand manège. Ce n’est pas un lot de cinq ou dix chevaux : ils sont une cinquantaine.
Aidan O’Brien fait redémarrer son 4x4 et s’approche du manège. À la surprise générale, l’entraîneur ne s’arrête pas : il rentre avec sa voiture dans le manège, au milieu des chevaux, avec vivacité. Ce n’est pas lui qui s’arrête pour rentrer, ce sont les chevaux qui doivent le laisser passer. Et les 2ans ne bougent pas une oreille devant cette voiture qui passe à un mètre d’eux pour faire le tour du manège dans le sens inverse des chevaux. À Ballydoyle, oubliez les principes du code de la route. Il n’y a qu’une règle : priorité à Aidan O’Brien. Et ce n’est pas par prétention, loin de là : Aidan O’Brien réalise tout ce qu’il fait avec exigence, mais aussi avec une immense humilité. D’ailleurs, lorsqu’il parle, il n’utilise quasiment jamais "je", mais presque toujours "nous". S’il se permet de rouler à sa convenance, c’est simplement parce qu’il est très concentré, et que c’est ainsi qu’il va le mieux voir ses chevaux. Une fois dans le manège, toujours en voiture, Aidan O’Brien regarde les poulains qui marchent. « Là, c’est Caravaggio », nous indique-t-il, précisant : « Il ne va pas recourir cette année. » Tiendra-t-il le mile l’année prochaine ? « C’est possible… Il a beaucoup de vitesse. » Les chevaux ont tous, sur leur tapis de selle, leur nom, les initiales de leur père et le nom de leur mère.
Des infrastructures hors du commun
Outre ses pistes exceptionnelles, Ballydoyle compte aussi de très nombreuses infrastructures originales. Chaque cour est équipée de son manège (quatre en tout) et/ou de son – grand – rond de marche semi-couvert (quatre en tout), climat irlandais oblige ! Après chaque passage des chevaux, les tracteurs viennent les herser. Il en va de même pour les pistes :entre les deux canters des chevaux, un tracteur est passé sur la piste. Le plus grand manège de Ballydoyle est aussi équipé de haut-parleurs. Quand les chevaux sont à l’intérieur, les enceintes diffusent de la musique, pour habituer les chevaux au bruit : il est encore possible de s’entendre, mais le son reste élevé. Chaque cheval dispose aussi de son propre petit paddock, où il peut être emmené l’après-midi. Ils ne sont pas forcément lâchés au paddock, mais y vont parfois juste tenus en main pour brouter un peu. Les chevaux peuvent ressortir l’après-midi, pour marcher, être montés, en rênes longues, en fonction de chacun d’entre eux. Ballydoyle possède logiquement des stalles de départ. Et plus spécifiquement, il y a notamment des stalles américaines, munies de leur habituelle sonnette, afin que les chevaux s’habituent à ce bruit strident. L’autre particularité de Ballydoyle est d’avoir son propre centre de quarantaine, avec piste d’entraînement, qui accueille notamment les chevaux en partance pour l’Australie. S’y trouvent en ce moment Order of St George (Galileo) et Highland Reel (Galileo), prétendants au Qatar Prix de l’Arc de Triomphe mais qui ont aussi des engagements en cours en Australie. Auparavant, la quarantaine des pensionnaires d’Aidan O’Brien se déroulait à Newmarket. Outre la quarantaine, on croise à plusieurs endroits de Ballydoyle des boxes, au nombre de trois ou quatre, isolés des cours. Ils sont destinés à accueillir les chevaux susceptibles d’être malades, afin de réduire le risque de contamination.
Direction la piste.
Nous sortons du manège, les chevaux aussi. Les poulains en tête, puis les pouliches. Aidan O’Brien les regarde une nouvelle fois passer, au pas, en file indienne. Le lot est impressionnant, semble ne pas avoir de fin. Combien sont-ils ? « Entre quarante-cinq et cinquante. Je ne compte pas. » Une fois les chevaux passés, nous repartons en remontant encore une fois la file de chevaux. La voiture a beau être très proche, pas un ne bouge. « Les chevaux vont passer par le petit bois, nous les rejoignons plus loin. » Nous entrons dans le petit bois et nous garons immédiatement, à un emplacement prévu pour la voiture. Les chevaux arrivent, plutôt de face. Aidan O’Brien les regarde encore. Une fois passés, nous repartons. Les chevaux sont sur une petite piste longeant la route, au trot. Pas de trot enlevé, mais un trot léger en suspension. Nous allons ensuite attendre les poulains et les pouliches à la piste.
Le regard et l’oreille.
Ils arrivent, au pas. AidanO’Brien les regarde passer un par un, prend les premières impressions des cavaliers. « C’est Promise to Be True ici. C’est une très bonne pouliche », nous précise-t-il. Cette piste forme une sorte de long rectangle et est construite sur une côte. Gazon au centre, cerclé d’une P.S.F. Le lot passe devant nous au pas et emprunte le long chemin en descente, sur P.S.F., qui mène au pied de la piste. Une fois tout en bas, ils s’élancent sur la partie opposée de la P.S.F. : ils travaillent donc en montée. Le canter se passe, à un rythme régulier. Aidan O’Brien les regarde tous, avec ou sans les jumelles. La respiration des poulains et pouliches est nettement audible, même si nous nous trouvons à une trentaine de mètres de leur piste : certains soufflent beaucoup, d’autres à peine. Une fois le canter terminé, le lot est en haut de la piste. Il redescend vers nous au pas. Aidan O’Brien regarde encore chacun de ses chevaux, prend les impressions des cavaliers, qu’il appelle par leur prénom. L’échange est bref. Aidan O’Brien les écoute, très concentré, et demande éventuellement à ce qu’un cheval passe derrière un autre pour le second canter. Ce second canter est plus poussé. Une pouliche avale la piste avec une grande facilité. Aidan O’Brien nous précise : « Voilà Roly Poly. Elle court les Cheveley Park Stakes samedi [elle s’y est classée deuxième, à une tête de la gagnante Brave Anna, ndlr]. » La pouliche est assez impressionnante dans son action.
Thalasso sur place
Ballydoyle dispose aussi de sa propre thalassothérapie, avec une piscine permettant de nager les chevaux en ligne droite ou en cercle. Un solarium est installé dans ce même hangar, pour permettre aux chevaux de vite sécher. Le nouveau "jouet" d’Aidan O’Brien est le training aquatique, cette fameuse boîte avec tapis roulant que l’on emplit d’eau à une hauteur variable afin de faire travailler telle ou telle articulation d’un cheval.
Une fois les deux canters terminés, le travail est achevé. Les cavaliers se rendent vers les écuries. Ils finissent le chemin à pied, tenant leur cheval en main. Ils repassent alors une énième fois devant Aidan O’Brien, qui baisse sa fenêtre et s’adresse à ses cavaliers pour un ultime échange, toujours intense et rapide. Un rituel immuable, pour chacun d’entre eux : le salut est toujours suivi du prénom du cavalier. Il demande à chacun si tout s’est bien passé, si un cheval en particulier n’a pas toussé, leur demande éventuellement de bien remettre la couverture sur le dos du cheval. Des échanges courts, ponctués par un invariable : « "Good man"/"Good girl". Parfait. Merci… et le prénom du cavalier. »
Sur le trajet du retour, Aidan O’Brien s’arrêtera encore pour observer ses chevaux avant qu’ils ne soient pansés. Sur ce lot d’environ cinquante unités, il a dû regarder chaque cheval une dizaine de fois, sous toutes les coutures : droite, gauche, face, arrière. Les poulains et les pouliches se séparent, rejoignant un rond extérieur de marche. « Ils vont marcher environ trente minutes. Ensuite, ils pourront manger un peu d’herbe. » Aidan O’Brien nous raccompagne enfin au niveau des bureaux, là où nous nous sommes rencontrés. Nous descendons de la voiture, et lui demandons si nous pouvons prendre une photo avec lui. Il accepte et guide même la séance : « Allons nous mettre plutôt devant la statue de Giant’s Causeway, ce sera mieux. » Nous le remercions de son accueil. Il nous remercie d’être passés et nous serre la main en nous regardant droit dans les yeux, puis il repart au volant. A 13h, c’est lui qui s’assurera que les grilles de toutes les cours sont bien fermées, pour que les chevaux puissent profiter d’un calme parfait entre 13h et 15h, avant l’écurie du soir.
http://galoppourlavie.webnode.fr/ http://association-lynegueroult.com/ http://www.actuanimaux.com/categorie/sauvez-un-cheval https://www.youtube.com/watch?v=DR2DbU5Uq-4 |
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02.10.16 - 22:45 |
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tabumo |
# 89 ≡ Re: PRIX DE L'ARC DE TRIOMPHE 2016 (gr I, Chantilly) 02.10 |
Groupe I
852 posts depuis le 1/8/2010
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Superbe récit IVCT. J'adore ce genre de récit et encore plus de reportage en immersion dans les écuries de course ou les élevages. D'accord,O'BRIEN travaille avec la meilleure matière première qui soit,sur les plus belles infrastructures aussi mais c'est aussi beaucoup sa rigueur,son talent,son professionnalisme,son organisation qui font qu'il a les résultats qu'il a depuis des années. On voit trop(Je parle du milieu du trot que je connais bien)de gens qui font de l'à peu près,qui entrainent les chevaux quand leur tombe un bras,qui leur mettent des branlés sans chercher à comprendre le pourquoi du comment,qui les nourrissent mal et les soignent mal,ne les font pas récupérer après le travail ou les courses(je l'ai encore vu vendredi à MAUQUENCHY où certains font demi tour dans le tournant juste après l'arrivée avec des chevaux rasés,les douchent rapido sans masser les tendons avec le jet froid et les claquent attachés trois heures dans le box),etc... On n'a pas toujours la bonne matière première mais quand on fait son travail sérieusement et avec application et rigueur,on arrive souvent à obtenir des résultats et tout au moins à faire tourner la boutique. Que les branleurs qui existent dans ce milieu ne se plaignent pas de crever la faim et de mettre bientôt la clé sous la porte. Ma mère m'a toujours dit que le travail finit toujours par payer et ça J'Y CROIS. |
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03.10.16 - 14:20 |
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