Après les fastes et les folles espérances, le train des désillusions entame son travail de sape avec cette morgue méthodique et implacable qui le caractérise, anéantissant les espoirs des sportsmen d'Europe, eux qui voyaient déjà se profiler une saison classique très haute en gamme avec in fine, l'
Arc le plus huppé depuis des décennies. (Je relis ce morceau de bravoure littéraire, et à n'en pas douter, c'est bien la plus noire des introductions jamais commises sur ce site, mais rassurez vous, l'espoir va renaître)...
Chez les chevaux d'âge,
North Light,
Ouija Board et
Doyen sont déjà - ou quasiment - hors jeu, alors qu'on ne sait trop ce qu'il en est de
Yeats.
Bago vient de décevoir d'une manière assez inquiétante, il faut l'admettre même s'il est question de problèmes de dos. On n'a pas de nouvelles de
Cherry Mix,
Prospect Park, mais on en a du Japonais
Zenno Rob Roy dont on a appris la probable défection dans l'
Arc...
Restent quand même les révélations (
Valixir,
Alkaased) et quelques valeurs sûres comme
Westerner ou les confirmés
Grey Swallow et
Azamour qui préfèreront peut-être rester sur les distances intermédiaires prodigues en grands-rendez vous Outre-Manche, désormais à l'abri des velléités de la dynastie
Montjeu.
Chez les trois ans, bien plus que la défaite de
Motivator dans les
Eclipse Stakes, c'est le retrait définitif de
Shamardal, pierre angulaire de la saison classique, qui est véritablement la mauvaise nouvelle de la semaine. Faut-il y voir les effets du programme qui lui a été assigné depuis le début 2005, car au delà de ses performances rapprochées du mois de Juin, il était déjà la sur la brèche à Dubaï pour préparer le
Kentucky Derby. La réponse est dans la question, et c'est à nouveau l'occasion de pointer du doigt (l'index) ce meeting oriental, dangereux pour l'intégrité physique et mentale des chevaux appelés à concourir jusqu'en Octobre.
Avec
Shamardal, c'est une sorte de pur-sang d'un nouveau genre qu'il me tardait de revoir, qui disparait des champs de course auréolé d'une quadrilogie de groupes I inédite et magistrale, non sans avoir légué à un
Prix du Jockey-Club qui restera dans les mémoires, ses nouvelles lettres de noblesse. Cheikh Mohammed, dont l'esprit sportif a été maintes fois loué, avait déjà connu les affres des blessures intempestives avec le retrait de
Dubai Millenium, alors qu'il venait de mettre sans délicatesse 6Millions USD sur la table, défiant le Team Coolmore, pour un tête à tête homérique entre son protégé et le grand
Montjeu.
Battu dans les
Eclipse donc,
Motivator est-il, à l'image d'
Hurricane Run un vrai 2400 ? C'est assez probable. Sur la distance classique, il reste sur la foi de son
Derby le meilleur trois ans d'Europe. Etonnant, ce
Oratorio, régulièrement battu par
Shamardal (...) ou encore
Dubawi : il matérialise à merveille le genre de ces victoires imprévisibles dont on ne sait trop s'il faut les expliquer sans conviction par la qualité insoupçonnée du lauréat, ou par la défaillance des opposants notamment quand se trouve parmi eux un épouvantail réputé imbattable...
On se réfèrera quand même aux explications de Aidan O'Brien (Paris Turf de dimanche) qui valent leur pesant d'or, dignes qu'elles sont de figurer au choix dans les équivalents équins des traités freudiens ou dans le bêtisier bien fourni des entraîneurs de chevaux de course :
Oratorio vient de donner ses clés après 8 courses dont 5 groupes I..., il est le seul pur-sang au monde à grossir avant la compétition..., un modèle de relaxation..., on le voit même tenir 2400. Après tout, pourquoi pas ?
C'est curieux (mais tout à fait agréable) cette propension qu'ont les chevaux cette année à se ballader de 1600 à 2400 avec des aller-retours abscons pour les tenants du plus pur des classicismes.
Finissons sur une note optimiste. Il reste en lice suffisamment de très bons chevaux, et peut-être même des phénomènes pour contrecarrer les plans de la fatalité : gageons qu'il y en aura assez pour assouvir notre exigente passion.